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La Loire, entre chien et loup.
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Je quitte
ton lit,
timidement,
avec une lenteur souple,
sans déchirer ta nuit.
Tu dors
paisible, belle Dame…
Un essaim d’étoiles éclaire le ciel d’une trainée de poudre malicieuse. Le
soleil docile vient de se glisser dans la terre encore froide pour y semer le
jour à venir. Ton souffle vaporeux saupoudre ton long miroir pastel d’une brume
sauvage et tiède. Tes paupières, empourprées d’azur indigo, éclaboussées de
poussière de lune, tremblent au-dessus de tes songes facétieux qui te font sourire.
Tes lèvres,
accrochées au brillant éphémère d’un verni dérisoire,
attendent le velours de mon baiser volage.
Egaré dans l’insomnie, je songe au temps. Celui passé, celui passant, celui
dépassé. Je regarde tous les bonheurs colorés qui se sont enroulés autour de
notre voyage. Tantôt sous le soleil. Tantôt sous les nuages. Vois-tu encore ces
ondées s’aventurant sur notre passage pour encombrer notre course ? Nous,
blottis sous un parapluie de fortune, tes majestueux saules impassibles,
généreusement ouverts sur l’intime sentier de nos rires, cœur contre cœur,
laissant s’enfuir, d’un pas chaste et aérien, les gouttes d’eau devenues
ruisseaux maladroits où s’enfouissent nos silences dans un tourbillon ténébreux…