La brume, enveloppant les chiens et les loups de l’insomnie, s’accroche à mon encre assoupie pendant que la lune sombre dans un sommeil étrange. Ma page glisse, tourne, blanche et vieillie. Mes mots crépusculaires la laissent nue et froide. Un rêve dans ma tête tempête, en guerrier épuisé. Dos au mur, face à la fenêtre ouverte dansant dans les courants d’air de la chute du jour venue me mordre, je bois l’air tiède, épais comme un velours détrempé. Plus loin l’orage et ses tambours bruyants peinent à avancer. Ma page blanche s’envole, tourbillonne, agaçante, insolente. Le collier de l’air lourd serpente dans les plis de mon cou et un silence idiot dort dans mon encrier. La pluie tâtonne sur l’horizon, aura-t-elle la force de me faire frémir. Je caresse les portes de la nuit close en sirotant un verre de vin blanc que le soir a abandonné à la lisière de mon bureau. L’aurore sans poussière me tente pour devenir ce fou lumineux que mes rêves espèrent. Alors, la magie de ta main douce, légère, brûlante, se pose, papillon évanescent, sur mon épaule… ton baiser, la musique de la pluie… demain peut encore attendre un peu.